Dans un contexte où dégager des bénéfices est plus ardu que jamais, voici les secrets de « fabrication » d’une forte rentabilité. Dix principes que Thierry Denjean, expert-comptable et entrepreneur, applique et recommande.

1 – Tenez-vous à votre stratégie

« De nombreuses entreprises se lancent ou avancent sans aucune stratégie. De cette manière, il est impossible de réussir. Pour bâtir une entreprise rentable, la première règle consiste à définir une stratégie mûrement réfléchie… puis à s’y tenir ! On voit trop d’entrepreneurs faire marche arrière et changer de cap lorsque la politique choisie ne porte pas ses fruits immédiatement.

Après avoir travaillé pendant quelques années dans de grands groupes d’audit et d’expertise-comptable, Thierry Denjean a choisi de voler de ses propres ailes. En 1992, il crée sa structure, Denjean & Associés. Vingt ans plus tard, celle-ci compte 70 collaborateurs et se distingue par d’excellentes performances. Le cabinet Denjean & Associés est ainsi classé troisième cabinet d’expertise-comptable et d’audit français le plus rentable par la revue La Profession comptable.

Ces derniers, sous prétexte qu’ils ont du mal à vendre aux grandes entreprises qui constituaient leur cible privilégiée, décident, par exemple, de se tourner vers les PME. Ou bien, ils abandonnent leur stratégie de développement à l’international dès lors qu’ils font face à des complications inattendues… C’est une erreur : si vous avez défini une politique judicieuse au départ, il n’y a aucune raison d’en changer. L’expérience montre qu’une bonne stratégie finit toujours par payer. Alors persévérez ! »

2 – Proposez de la qualité

« Il est impossible de construire une entreprise rentable à long terme en adoptant une politique centrée sur une stratégie low-cost. Une entreprise qui, pour se distinguer, mise essentiellement sur des prix inférieurs à ceux du marché peut être concurrencée par n’importe quelle structure installée dans un pays à bas coûts ; et comme les produits ou les services qu’elle propose sont des produits ou des services standards, ses clients la lâcheront instantanément au profit du premier nouvel entrant alignant des tarifs plus compétitifs.

Moralité, quelle que soit votre activité, la qualité est votre seul véritable atout face à la concurrence. Si vous avez l’obsession de fournir des produits ou des services de qualité, vous en constaterez les bénéfices à la dernière ligne de votre compte de résultat ! »

3 – Soyez obsédé par la marge

« Aujourd’hui, les chefs d’entreprise sont presque tous obnubilés par la croissance de leur chiffre d’affaires. Ceci s’explique par plusieurs raisons. D’abord, pour un dirigeant, il peut sembler plus valorisant d’être à la tête d’une société dont le chiffre d’affaires augmente d’une année sur l’autre. Ensuite, avec une activité en croissance, l’entreprise a le moyen d’occuper ses équipes et d’éviter les spectres du chômage partiel et des licenciements. A ces facteurs s’ajoute la pression des banques : les banquiers n’apprécient pas qu’une société présente des comptes annuels avec un chiffre d’affaires identique à celui de l’exercice précédent, voire en baisse… Mais disons-le haut et fort : il s’agit là d’arguments fallacieux par lesquels les entrepreneurs ne doivent pas se laisser piéger. Car ce qui doit vous obséder, ce n’est pas votre chiffre d’affaires, mais votre marge ! Autrement dit, vous devez impérativement vous attacher à ne générer que du chiffre d’affaires à forte marge. A cet effet, il faut que vous passiez régulièrement en revue votre portefeuille clients, afin de vérifier que chacun vous apporte une rentabilité suffisante. Si vous ne gagnez pas assez d’argent avec tel ou tel client, dites-le-lui clairement, et annoncez-lui que vous ne pouvez pas continuer à travailler dans ces conditions. Il refuse de payer plus cher ? Ne tergiversez pas et mettez fin à vos liens commerciaux…

Je préconise de réitérer l’analyse de votre portefeuille clients chaque semestre, et même chaque trimestre si cela vous est possible. »

4 – Externalisez votre informatique

« L’informatique est un poste avec lequel on peut perdre beaucoup d’argent sans s’en rendre compte. Pourquoi ? Parce qu’un dirigeant a l’impression qu’il connaît un peu le système d’information de sa société, qu’il pourra se procurer du matériel et des logiciels à bas prix et qu’il maîtrisera facilement ses charges si l’informatique est gérée en interne. C’est ce que j’ai moi-même longtemps pensé… à tort !

En effet, en étudiant attentivement le marché de l’externalisation informatique, on se rend compte que recourir à un prestataire est moins onéreux qu’avoir un service informatique dans l’entreprise. A la condition d’accepter de passer du temps pour bien définir ses objectifs et ses besoins, de faire un appel d’offres, de recevoir les prestataires, de comparer leurs propositions, et de négocier les tarifs… Mais le jeu en vaut la chandelle. Chez Denjean & Associés, nous avons mené cette démarche il y a trois ans, et, depuis, nos dépenses informatiques ont été divisées par quatre ! De plus, notre système d’information a gagné en sécurité et en fiabilité : contrairement à ce qui se passait auparavant, il n’est plus jamais en panne. Bref, nous avons tout gagné dans cette externalisation. De l’argent, mais aussi du temps de travail et de la tranquillité d’esprit, sans oublier un autre point important : une crédibilité accrue vis-à-vis de nos clients… Je recommande vivement à tous les chefs d’entreprise de franchir le cap ! »

5 – Développez le télétravail

« Aujourd’hui, dans les entreprises, les gens travaillent mal. Chacun est en permanence l’objet de sollicitations qui l’empêchent de se concentrer : appels téléphoniques, réunions, collègues qui viennent discuter ou proposent d’aller boire un café, supérieurs hiérarchiques désireux de faire en urgence le point sur un dossier, etc. Si vous faites la somme de ces différents éléments, et que vous y ajoutez la fatigue engendrée par les trajets entre le domicile et le lieu de travail, vous obtenez… des collaborateurs à l’efficacité réduite ! L’une des solutions pour résoudre ce problème est de Celui-ci doit être organisé entre les parties avec l’accord plein et entier des salariés : en aucun cas un employé ne peut se voir imposer de travailler à distance.

Par ailleurs, l’employeur doit prendre en charge le coût du poste informatique et des moyens de communication mis en place entre le collaborateur et l’entreprise. Le but du télétravail n’est pas de transférer certains coûts de l’entreprise vers le salarié, mais de permettre à ce dernier de travailler dans de meilleures conditions et plus efficacement ! Dans notre cabinet, nous testons ce système avec quelques-uns de nos collaborateurs qui travaillent chez eux de façon partielle, un ou deux jours par semaine. Cette organisation leur permet de profiter des avantages du télétravail tout en préservant leur lien avec l’entreprise. Maintenant, nous sommes en phase de réflexion avec les délégués du personnel en vue d’offrir la même possibilité à tous nos salariés. »

6 – Optimisez vos budgets formation

« Chaque année, toutes les entreprises doivent contribuer à l’effort national de formation en versant un certain pourcentage de leur masse salariale à un organisme paritaire collecteur agréé (Opca). Cela, tous les dirigeants de PME le savent. Ce qu’ils ignorent, c’est qu’en s’y prenant bien ils peuvent tirer un grand profit de leurs cotisations pour la formation.

En effet, la loi stipule que, en contrepartie de ses versements, l’entreprise a le droit de faire financer, à due concurrence, des actions de formation pour ses salariés. Or, chaque année, de très nombreuses PME cotisent sans utiliser leurs droits à financement et les Opca se retrouvent avec des excédents de fonds qui ne demandent qu’à être octroyés… Ainsi, un dirigeant de PME qui se fait connaître de son Opca et noue avec son conseiller de formation une relation de confiance et de partenariat peut faire financer les actions de formation de ses salariés au-delà même des fonds qu’il a versés !

Nous recommandons aux entreprises de présenter chaque année leur plan de formation au conseiller de leur OPCA. Si le montant de ce plan dépasse leur cotisation annuelle, c’est l’occasion de demander un budget complémentaire ! En général, les OPCA présentent le dossier à leur direction et le demandeur peut obtenir des rallonges budgétaires jusqu’à 50 % si le dossier est motivé et accepté. C’est un énorme atout si l’on considère, comme nous le pensons, que la formation des salariés constitue un enjeu majeur de rentabilité pour l’entreprise, car source à la fois de motivation des salariés et de qualité des produits et des services… »

7 – Fidélisez votre équipe

« Une équipe en renouvellement constant coûte très cher. Se séparer d’un salarié est onéreux, recruter quelqu’un pour le remplacer aussi. De plus, ces mouvements désorganisent l’entreprise et la discréditent vis-à-vis de ses clients. D’où l’importance de fidéliser ses collaborateurs. Au-delà des augmentations salariales, qu’il est parfois impossible d’accorder dans une PME, le chef d’entreprise peut utiliser différents outils de motivation. A commencer par la participation et l’intéressement dont les salariés sont très friands. Ceux-ci apprécient également beaucoup de se voir proposer des formations professionnelles qui accroîtront leur employabilité : cours de langues, apprentissage de logiciels métier, formation à la gestion de leur carrière… Enfin, toutes les initiatives que peut prendre le dirigeant pour créer une bonne ambiance dans l’entreprise sont les bienvenues ! »

8 – Placez bien votre trésorerie

« Les dirigeants de PME pensent que la trésorerie de leur société est forcément vouée à demeurer sur un compte bancaire ou à être placée en Sicav de trésorerie. C’est faux ! Toute entreprise – avec éventuellement l’accord de ses actionnaires – a le droit de placer ses excédents de trésorerie dans des véhicules financiers sortant des sentiers battus. Si notre cabinet a dégagé une forte rentabilité en 2011, c’est notamment parce que nous avons encaissé des produits financiers conséquents en plaçant notre trésorerie dans un portefeuille d’obligations de grandes entreprises. Je conseille à toute PME qui a un matelas de liquidités d’en placer une partie sur ces obligations, qui ne présentent quasiment aucun risque et rapportent facilement 5 % par an ! »

9 – Entourez-vous de conseils

« Etant expert-comptable, je pourrais considérer que je suis suffisamment informé pour prendre seul des décisions. Mais il y a cinq ans, j’ai voulu me passer des services d’un avocat pour résoudre un problème fiscal complexe et je m’en suis mordu les doigts ! Depuis, j’ai réalisé que lorsque l’on a des opérations spécifiques à mener, recourir à des conseils avisés permet de gagner beaucoup d’argent. Certes, les services d’un bon expert en fiscalité ou en droit des affaires ont un coût. Mais ce coût est largement compensé par les économies qu’un spécialiste vous permet de réaliser grâce à la maîtrise qui est la sienne de mécanismes sophistiqués dont vous ignoriez jusqu’à l’existence… »

10 – Fréquentez vos concurrents

« Pendant quinze ans, j’ai complètement négligé de nouer et d’entretenir des relations interprofessionnelles dans mon secteur d’activité. Je pensais que rencontrer des concurrents dans le cadre de déjeuners ou de cocktail s ne pouvait rien m’apporter. Là encore, je me trompais.

En réalité, tout chef d’entreprise a intérêt à fréquenter ses confrères. Pourquoi ? Parce que l’expérience montre que vos concurrents, s’ils ont une bonne image de vous et de votre entreprise, deviendront vos prescripteurs au moment où leurs clients les solliciteront pour des produits ou des services qu’ils ne peuvent pas leur fournir. Bien entendu, vous devrez veiller à leur renvoyer l’ascenseur à chaque fois que ce sera possible ! »